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Question 8 - Q&R

 

  

Comment développer la culture de prise en charge en soins palliatifs au sein des services non dédiés, notamment en services à orientation gériatrique ?

 

L’avis 139 du CCNE mentionne page 18 : « La médecine et le système de santé doivent absolument éviter d’engager des traitements ou de recourir à des techniques médicales (notamment les pratiques réanimatrices) susceptibles de faire advenir des « situations-limites », qui constituent de nouvelles formes de fin de vie marquées par une vulnérabilité extrême. Ces situations-limites, créant de véritables dilemmes éthiques, font naître une grande incertitude quant à ce qui relève ou non du juste soin dans l’intérêt de la personne souffrante. (à titre d’exemple : l’aboutissement de la réanimation de patients adultes ou de nouveaux nés prématurés chez qui la question de l’arrêt des thérapeutiques actives peut ensuite se poser, la possibilité de fin de vie longue dans une totale dépendance, ou de fin de vie avec une altération majeure de la conscience, de situations de maladies graves et incurables chronicisées par des traitements lourds… ).  Il n’existe pas à ce jour de critères pronostiques permettant de prédire de façon certaine l’importance du handicap, la qualité de vie future et facilitant la prise de décision en situation d’incertitude. L’approfondissement, par les soignants, de la frontière entre obstination déraisonnable et arrêt des thérapeutiques actives, le développement systématique de procédures collégiales, l’acculturation à la mise en œuvre d’une « désescalade thérapeutique » lorsque nécessaire, sont de nature à optimiser la justesse des décisions médicales. La désescalade thérapeutique contribue à la prévention des situations de vulnérabilité ou de fin de vie difficiles et permet d’éviter que la médecine ne les génère. La personne malade ne doit jamais pâtir de l’incapacité des soignants et de l’entourage à comprendre et accepter que le projet curatif est déraisonnable. Il est essentiel pour les soignants d’apprendre à ne pas faire dans certaines situations de soins, au seul motif que l’on sait faire ». 

La culture palliative devrait donc être développée, outre en cancérologie, en service de réanimation néo-natale ou adulte, au sein de tous les services amenés à prendre en charge des patients porteurs de maladies chroniques susceptibles d’avoir une évolution terminale (insuffisance cardiaque ou respiratoire par exemple, mais aussi maladie neuro-évolutive,…).

Les services à orientation gériatrique accueillent essentiellement des patients polypathologiques, de plus de 85 ans, porteurs pour beaucoup de troubles cognitifs. De par leur fragilité, même en dehors de toute maladie dite incurable, beaucoup pourraient être considérés en fin de vie, mais les gériatres savent combien il est difficile d’anticiper la toute fin de vie chez ces patients, et c’est encore plus vrai en EHPAD. Dans les territoires qui bénéficient d’une équipe mobile de soins palliatifs, il semble important de pouvoir se faire aider par cette équipe pour les situations particulièrement complexes. Dans les autres cas de figure, il est impératif qu’il y ait régulièrement des temps de réunion inter-disciplinaire pour croiser les regards des professionnels sur l’évolution  de chaque situation, des discussions si possible avec le patient d’abord mais aussi avec sa personne de confiance ou au moins sa famille sur le niveau d’intervention médicale souhaitable, une éventuelle décision de limitation ou d’arrêt des traitements (qui sera prise de manière collégiale), et un accompagnement de fin de vie prenant en compte l’ensemble des symptômes physiques et psychiques d’inconfort du patient. La culture gériatrique doit reposer sur le ratio bénéfice / risque de chaque acte diagnostique ou thérapeutique, la réflexion préalable à tout acte concernant le bénéfice attendu pour le patient, la capacité à renoncer à un acte pour préserver le confort du patient et éviter toute obstination déraisonnable quand cela est le cas, sans jamais verser non plus dans un fatalisme coupable ou un abandon thérapeutique.